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Réforme des retraites 2023 : minimum de pension à 1.200 euros, bruts ou nets ? Ces détails qui vont décevoir le plus grand nombre

La réforme des retraites 2023 est désormais connue. Un point marquant concerne la pension mensuelle minimale de 1.200 euros promise aux retraités actuels et à venir. Mais le diable se cache dans les détails...

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16 janvier 2023, 07:58, par Marcus95

Retraites... pourquoi ne pas demander d’effort aux retraités ?

Le gouvernement ne fait porter la nécessaire réforme des retraites que sur les travailleurs, qui devront attendre plus longtemps pour partir à la retraite. Les retraités sont exonérés de toute contribution, alors qu’ils sont en moyenne mieux lotis que les actifs. Un choix qui pourrait passer pour électoraliste...

Pas de doute, même si elle est impopulaire, une réforme est indispensable pour assurer l’avenir de notre système de retraites par répartition. La fécondité décline et l’espérance de vie augmente. Résultat :alors que 3,8 cotisants payaient pour 1 retraité en 1970 et qu’il y avait encore 2,1 cotisants pour 1 retraité au début des années 2000, ce ratio est descendu à 1,7 aujourd’hui et devrait encore baisser, avec 1,2 cotisant pour un retraité en 2070. Ce n’est évidemment pas tenable. Le dernier rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR) montre d’ailleurs que le régime général des retraites va se trouver en déficit de 10 milliards d’euros dans cinq ans, de près de 20 milliards dans dix ans et resterait dans le rouge ainsi pendant vingt ans.

Donc, le gouvernement a décidé de réformer le système, et pour cela a choisi, comme ses prédécesseurs en 1993, 2003, 2010 et 2014, de retarder l’âge auquel il devient possible de prendre la retraite. En pratique, ce report peut prendre la forme d’un recul de l’âge légal de départ ou d’un accroissement du nombre d’années de cotisation. Elisabeth Borne et Emmanuel Macron ont choisi de faire les deux, en repoussant l’âge minimal de 62 à 64 ans, et en allongeant également progressivement la durée de cotisation de 42 à 43 ans en 2027.

Les 20-50 ans vont subir cette énième réforme des retraites, alors que les retraités sont épargnés.

Trois leviers pour réformer
Allonger la durée du travail semble un choix logique, alors que la durée de vie en bonne santé augmente, pour garder un équilibre raisonnable entre le temps passé au travail et celui passé à la retraite. Parmi les pays développés, la France est seule à afficher un âge légal de départ à 62 ans, quand les autres pays sont passés à 63, 65 voire 67 ans. Et en moyenne, les Français bénéficient de cinq années de retraite de plus que les autres.

Pour autant, même si le gouvernement s’est focalisé sur cette solution, il existe d’autres leviers possibles pour redresser les comptes du système de retraite, qui n’ont pas été considérés. Relever les cotisations versées par les salariés ou leurs employeurs eut été une autre option… mauvaise. C’était la solution adoptée jusqu’au début des années 2010, mais ses inconvénients sont devenus rédhibitoires. Les cotisations sociales en France sont déjà parmi les plus élevées au monde. Les cotisations salariales amputent les salaires et donc pèsent sur le pouvoir d’achat des travailleurs, qui payent plus alors que pourtant, quand ce sera leur tour d’être à la retraite, ils recevront moins que leurs ainés. Et les cotisations patronales, déjà bien plus lourdes en France qu’ailleurs, renchérit le coût du travail et donc mine la compétitivité des entreprises. L’économiste Patrick Artus, comparant l’effet de chacun des prélèvements sur les entreprises, a montré que les cotisations sociales étaient les plus nocives pour la croissance et l’emploi.

Il existe aussi une autre piste, même pas évoquée… et pourtant justifiée sur le plan économique : faire plus contribuer les retraités. L’idée est très impopulaire mais pourtant, la comparaison internationale, encore une fois, est éclairante : les retraités en France profitent d’un niveau de vie supérieur à leurs homologues ailleurs en Europe. C’est même le seul pays au monde (avec l’Italie) où ils sont mieux lotis que le reste de la population, et même que les actifs en excluant les chômeurs (aux plus faibles revenus).

Certes, la pension moyenne des retraités est plus faible que le salaire moyen des actifs, mais si l’on compte d’un côté que les actifs ont souvent des enfants à charge et, de l’autre côté, que les retraités sont plus nombreux à être propriétaires de leur logement, au final, le niveau de vie médian des retraités dans l’Hexagone s’élevait, en 2019, à 2310 euros par mois, supérieur de 9,5 % au niveau de vie de l’ensemble de la population, de 2110 euros par mois, selon l’enquête Revenus fiscaux et sociaux de l’Insee.

Retraités plutôt fortunés
La génération des retraités actuels, largement issue du baby-boom d’après guerre, a connu les Trente Glorieuses, un chômage moindre, des carrières moins précaires que les générations suivantes, beaucoup ont pu partir tôt à la retraite, quand la limite d’âge était encore à 60 ans, et avec de bonnes pensions, bénéficiant d’un taux de remplacement de leur salaire très supérieur à celui dont bénéficieront leurs enfants. Ils ont aussi un patrimoine plus élevé que les actifs.

Certes, ces dernières années, les pensions ont, de fait, baissé dans l’ombre, avec d’abord la hausse de la CSG des retraités en 2017, et des revalorisations de pensions inférieures à l’inflation. Cependant, les retraités gardent des avantages qui n’ont pas lieu d’être, comme l’abattement d’impôt sur le revenu de 10% pour "frais professionnels" dont la suppression ne toucherait pas les plus modestes (seule la moitié des foyers français sont redevables de l’IR). Il est ainsi possible de réduire la grande majorité des pensions tout en préservant les petites retraites. Une mesure plus juste que de continuer à sous-indexer les pensions… ce qui pourrait cependant aussi se justifier en ces temps de forte inflation, où les salaires non plus ne suivent pas : le choc négatif du pouvoir d’achat ne doit pas reposer que sur les actifs mais sur tout le monde.

Pour autant, toucher aux pensions est un tabou. Au contraire, les petits retraités vont être les seuls à sortir gagnants de cette réforme puisqu’une partie des économies attendues des mesures d’âge serviront à financer une augmentation du minimum retraite (pour les carrières complètes) à 1200 euros bruts pour tous les pensionnés, à venir et actuels. Certes, cette mesure n’est pas un luxe, venant en aide aux seniors les plus modestes, mais rappelons que le taux de pauvreté des retraités (représentant moins de 60% du revenu médian) est de moins de 10% en France, contre 14% pour l’ensemble de la population.

Electorat à ménager
Pourquoi un tel traitement de faveur des retraités ? Parce que politiquement, ils sont intouchables. Les seniors ont un poids considérable dans la vie politique. Les plus de 65 ans représentent 20% de la population mais ils sont plus inscrits sur les listes électorales, représentant 25% des électeurs potentiels et ils se rendent aux urnes : à la présidentielle 42% des 18-24 ans et 46% des 25-34 ans se sont abstenus là où les 60-69 ans n’ont été que 12 % à bouder le scrutin.

Surtout, les retraités votent en masse pour Emmanuel Macron. En 2017, le président avait obtenu des scores comparables dans toutes les catégories d’âge et avait donc une bonne base électorale parmi les actifs. En 2022, son score du premier tour auprès des plus de 65 ans est de 39 %, soit 12 points de plus que son score national. Emmanuel Macron ne peut donc plus se permettre de se fâcher avec cet électorat… quitte à l’exonérer plutôt injustement de tout effort dans cette réforme.

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