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Pierre X et Isabelle Y (prénoms inventés) font partie des premiers couples qui concluent un pacte civil de solidarité (Pacs), en 1999. Sur la foi d’une notice erronée de la chancellerie, qui indique (faussement) que les partenaires deviendront héritiers l’un de l’autre, du simple fait du Pacs, ils rédigent leur acte dans les termes suivants :
« Nous, Pierre X et Isabelle Y, concluons un PACS régi par la loi du 15 décembre 1999. Nous mettons à la date du contrat tous nos biens (mobiliers et immobiliers) en indivision. En cas de décès de l’un ou de l’autre, l’ensemble sera légué au partenaire survivant. » Le greffier du tribunal enregistre l’acte, censé avoir valeur de testament, sans rien trouver à redire, le 23 décembre 1999.
Lorsque Pierre décède, en 2012, Isabelle considère qu’elle est sa seule et unique héritière, ce que contestent la mère et les soeurs du défunt. Ces dernières l’assignent devant le tribunal de grand instance de Nancy pour, notamment, obtenir la nullité de l’acte dont elle se prévaut, la déclarer redevable d’une indemnité d’occupation des biens acquis en indivision, et voir ordonner le partage de la succession.
Le tribunal fait droit à leur demandes. Il dit que l’acte de 1999, du fait qu’il a été rédigé « conjointement », et que les dernières volontés des auteurs sont inscrites « sur un seul et même écrit, » n’a pas valeur de testament. Il s’agit en effet d’un testament « conjonctif ». Or, l’article 968 du code civil interdit qu’un testament soit fait, « dans le même acte, par deux ou plusieurs personnes soit au profit d’un tiers, soit à titre de disposition réciproque ou mutuelle ». Un testament est en effet un acte « unilatéral ».
Le tribunal juge donc qu’ Isabelle n’est pas l’unique héritière de Pierre, mais seulement co-indivisaire, avec la mère et les soeurs. Autrement dit, elle n’obtient qu’une moitié des biens achetés en indivision, la mère et les soeurs héritant de l’autre moitié.
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Testament conjonctif
Isabelle fait appel. Elle soutient que l’interdiction des testaments conjonctifs énoncée à l’article 968 du code civil porte une atteinte excessive au droit de propriété, à la vie privée et familiale, et à la convention européenne des droits de l’homme ; qu’en effet, « les considérations qui, en 1804, justifiaient l’interdiction de telles dispositions ont aujourd’hui disparu ».
La cour d’appel de Nancy, qui statue le 23 mai, répond que « les impératifs qui constituent le fondement de cette interdiction sont toujours d’actualité » : il s’agit de « préserver la liberté de tester, qui serait compromise si le testateur se trouvait soumis à l’influence de la personne avec laquelle il rédige le testament », mais aussi celle, pour l’auteur, de « révoquer ou modifier à tout moment, de manière discrétionnaire, ce testament ». Or, « le testament conjonctif, qui participe de la nature d’un contrat, ne pourrait être révoqué, ou modifié que par la volonté commune des parties ».
Isabelle soutient que l’acte du 23 décembre 1999 doit s’analyser comme un pacte tontinier, c’est-à-dire une convention en vertu de laquelle les parties ont entendu mettre en commun tous leurs biens et faire en sorte que le dernier survivant en devienne propriétaire. La cour d’appel juge que la clause de tontine ne peut être reconnue dans cet acte. Celui-ci stipule en effet que « tous les biens qui seront acquis par les parties le seront en indivision », alors que « dans le régime de la tontine, toute propriété indivise est écartée ». La cour confirme le jugement.
Le Pacs n’ayant pas d’incidence sur la succession, les partenaires du Pacs auraient dû faire deux testaments (chacun le sien).
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