Défense : davantage de financements publics et privés nécessaires pour le réarmement français, mais sans impôt supplémentaire

Le Président Macron a déclaré mercredi vouloir des investissements supplémentaires dans le domaine de la défense, sans augmenter les impôts.

jeudi 6 mars 2025, par Denis Lapalus

La guerre en Ukraine, un virage européen

"Notre prospérité et notre sécurité sont devenues incertaines." Emmanuel Macron s’est exprimé, mercredi 5 mars, dans une allocution télévisée consacrée à la défense nationale dans le contexte de la guerre en Ukraine et des récents revirements américains. "La menace russe est là et touche les pays d’Europe" a déclaré le chef de l’Etat. "Cette agressivité ne semble pas connaître de frontières et face à ce monde de danger, rester spectateur serait une folie", a-t-il ajouté.

Investissements supplémentaires, sans augmenter les impôts

Alors que le soutien américain aux Européens est incertain et que Donald Trump opère un rapprochement diplomatique avec Moscou, Emmanuel Macron juge que "les Etats européens doivent pouvoir mieux se défendre". Il a en ce sens promis des "investissements supplémentaires" dans le domaine de la défense, tout en assurant que cela se ferait "sans que les impôts ne soient augmentés". "Ce seront de nouveaux investissements qui exigent de mobiliser des financements privés, mais aussi des financements publics", a affirmé le chef de l’Etat. "Pour cela, il faudra des réformes, des choix, du courage", ajoutant avoir "demandé au gouvernement d’y travailler le plus vite possible".

Le Livret A et le LDDS partent en guerre

Le Livret A et le LDDS financeront le secteur de la défense © stock.adobe.com

Les pistes pour le financement de la défense

Ces points n’ont pas été évoqués par M. Macron et ne sont, à ce jour, que des hypothèses journalistiques.

  • livret A/LDDS : Comme évoqué déjà en 2023, les encours en épargne réglementée des Français n’est pas entièrement utilisé. L’essentiel des fonds déposés sur le livret A/LDDS servent, au final, à financer des PME, ou investir sur des actions du CAC40. Le tiers des capitaux déposés servant au financement des logements sociaux. Cette manne restante pourrait être réorientée vers le financement de la défense.
  • livret épargne souveraineté : cette proposition faite par les Sénateurs début 2024 revient donc d’actualité. Les sénateurs ont ainsi avancé la création d’un « livret épargne souveraineté ». La mise en place du livret épargne souveraineté est prévue pour le 1er janvier 2024. Exonéré d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux (tout comme le livret A), il soutiendra les entreprises de la base industrielle et technologique de défense. Ce soutien à l’industrie de défense par la population civile passe aussi par le souhait des sénateurs de « promouvoir l’attractivité des métiers de l’industrie de défense, notamment en direction des jeunes et des femmes  ».
  • Assurance-Vie : avec près de 2.000 milliards d’euros d’encours, l’épargne détenue en assurance-vie pourrait être également orienté vers le secteur de la défense. Ce qui bloque à ce jour, est la classification ESG et ISR des activités de la défense et de l’armement. Il est probable que ce secteur soit désormais considéré comme ESG, dans le sens où, défendre les personnes contre des assaillants a bien un enjeu social et solidaire.
  • Emissions obligataires : les fonds européens pourraient voir le jour, les Allemands n’étant plus désormais vent debout contre un endettement mesuré au nom de l’UE.

Livret épargne souveraineté : nouveauté épargne proposée à partir du 1er janvier 2024 pour soutenir le secteur de la défense

Ce nouveau livret épargne souveraineté, net d’impôt, pourrait voir le jour à compter du 1er janvier 2024 © stock.adobe.com

La Russie est devenue une menace pour la France

Emmanuel Macron a haussé le ton face au Kremlin. "La Russie est devenue une menace pour la France et pour l’Europe", a-t-il affirmé, ajoutant que Vladimir Poutine avait "déjà fait du conflit ukrainien un conflit mondial". Moscou "viole nos frontières pour assassiner des opposants, manipule les élections en Roumanie, en Moldavie", "organise des attaques numériques contre nos hôpitaux" et "tente de manipuler nos opinions avec des mensonges diffusés sur les réseaux sociaux". C’est la première fois qu’Emmanuel Macron accuse directement la Russie de mener des cyberattaques. Pour le président, "face à ce monde de danger, rester spectateur serait une folie."

En ce sens, "nous devons continuer d’aider les Ukrainiens à résister jusqu’à ce qu’ils puissent négocier avec la Russie une paix solide pour eux, et pour nous tous", a insisté Emmanuel Macron. Il a assuré travailler avec ses partenaires européens pour "consolider les engagements nécessaires à l’Ukraine", rappelant sa participation à la réunion de Londres, dimanche, entre différents dirigeants européens. Il est également attendu jeudi à un Conseil européen spécial sur la question de l’aide à Kiev et de la défense européenne.

Renforcer l’indépendance de l’Europe vis-à-vis des Américains

Le rapprochement observé entre Donald Trump et Vladimir Poutine rend la relation transatlantique incertaine. "Je veux croire que les Etats-Unis resteront à notre côté, a-t-il assuré, mais il nous faut être prêts si tel n’était pas le cas", ajoutant que "nous restons attachés à l’Otan, mais il nous faut (...) renforcer notre indépendance en matière de sécurité et de défense". "L’avenir de l’Europe n’a pas à être tranché à Washington ou à Moscou", a-t-il ajouté, alors que les Européens sont tenus à l’écart des négociations sur l’issue de la guerre en Ukraine.

Taxes douanières incompréhensibles

Le président est également revenu sur les nouvelles taxes douanières américaines annoncées par la Maison Blanche, les qualifiant d’"incompréhensibles". Après avoir appliqué une hausse de 25% au Canada, au Mexique et de 10% à la Chine, Donald Trump a menacé l’UE d’être la prochaine sur la liste. Emmanuel Macron a expliqué qu’il espérait encore "en dissuader" Donald Trump. Le président américain a promis d’imposer des "droits de douane réciproques" au nom de l’"équité" dans les relations commerciales entre les Etats-Unis et le reste du monde. Une telle décision "aura des conséquences sur certaines de nos filières", a prévenu Emmanuel Macron, et "ne restera pas sans réponse de notre part".

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